Il y a quelques temps, j’ai eu la chance de pouvoir m’entretenir avec le Président Fédéral, sur de nombreux sujets liés à la pratique de l’aikido. Parmi eux, l’expérience du débutant sur le tatami. Pourquoi reste-il ? Pourquoi abandonne-t-il ? Comment l’aikido peut-il proposer une porte d’entrée plus accessible aux néophytes ? C’est dans ce cadre que la notion de plaisir intervient. Car c’est un fait, la notion de plaisir n’est pas évidente lorsqu’on débute sur les tatamis.
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Et pour cause :
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– on s’essaie à un art martial dont les mouvements sont souvent contre-intuitifs et dont la nomenclature de techniques est complexe.
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– On complète sa pratique à main nue par un travail d’armes que l’on pourrait qualifier d’ingrat, et où l’on peut parfois entendre que c’est la douleur qui nous permettra de nous relâcher, et les années qui nous permettront de prendre du plaisir.
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On se questionne sur le sens de notre pratique, et des techniques que nous réalisons : Pourquoi Hanmi Handachi waza ? Pourquoi rechercher la perfection d’un geste qui pourrait se contenter d’être simplement efficace ?
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On s’interroge enfin sur cette notion d’efficacité : certes, on ne s’attendait pas à de la self-défense, mais les passerelles entre le dojo et la vie quotidienne nous semblent parfois fragiles : pourquoi faut-il attendre des années pour utiliser l’aïkido efficacement dans son quotidien (sur le plan technique) ?
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Aujourd’hui, les raisons qui ont poussé beaucoup d’aikidokas à continuer la pratique sont pour certains la passion, pour d’autres, la persévérance, et pour une grande partie, je le pense, l’ambiance du club. 
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Aikido : le plaisir posé sur un piédestal est difficilement accessible à tous

Aikido entre père et fille

 

Ce dernier point nous ramène à une notion que j’estime essentielle en aïkido : le plaisir dans la pratique.
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Car, comme on le constate aujourd’hui, l’apprentissage décorrélé de la notion de plaisir a ses limites :
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Les adolescents sont peu nombreux à assurer la transition avec le cours adulte (moins ludique, plus studieux)
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Les jeunes adultes recherchent souvent une certaine efficacité dans la pratique et se tournent davantage vers des arts martiaux compétitifs (judo, jjb…)
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Les plus âgés souffrent de douleurs physiques (genoux, hanches), et ne peuvent se lâcher comme ils aimeraient
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Bien sûr, ce portrait noir n’est pas la réalité de tous les clubs ni de tous les adhérents !
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Tous les enseignants ne sont pas non plus des bourreaux et la pédagogie s’est renouvelée depuis quelques années.
Mais il est important de remettre la notion de plaisir dans la pratique dès les premiers pas sur le tatami et veillez à ce que les débutants soient épanouis au dojo.
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Comment rendre accessible le plaisir de la pratique auprès de tous les pratiquants ?

Bruno Rivière et Bruno Leca à l’Université d’été de la FFAAA
– Grâce à l’introduction d’une dimension ludique même chez les adultes (utilisation spontanée des armes dans un cours à main nu, croisement avec d’autres pratiques martiales, plus de liberté dans la pratique (ju waza, henka waza), pratique inter-générationnelle avec les adolescents…etc.
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Grâce à un éclairage donnant du sens à l’élaboration d’une technique : à quoi servait cette technique dans le passé ? Comment peut-elle être déclinée à une situation de la vie quotidienne .
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Grâce à l’engagement et la valorisation des débutants dès le début : leur attribuer un sempai, les faire passer au milieu, diviser la salle en deux groupes (avancés et débutants) dans certains cas de figure
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En laissant les débutants faire les erreurs : en fonction de son niveau d’avancement, un débutant ne pourra pas corriger toutes ses erreurs. C’est à l’enseignant de doser ses remarques pour ne pas frustrer le débutant qui aura l’impression d’avoir un niveau médiocre, et pourrait se décourager. Et le découragé devient déserteur. Comme le dit si bien mon professeur, Arthur Frattini, on peut apprendre par le traumatisme ou par le plaisir. La première option pose l’enseignant face à ses propres limites (reproduire un modèle qu’il a lui-même subit, incapacité de proposer quelque chose de plus adapté à ses élèves). La deuxième valorise les qualités de transmission d’une pratique de l’enseignant à ses élèves tout en leur donnant envie de se dépasser. Le plaisir devient le moteur de la progression.
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– En se demandant personnellement pourquoi on est présent aujourd’hui, sur les tatamis, et en se remémorant ce qu’on aime le plus faire dans notre pratique (une technique, une chute, un exercice…). Ce moment de prise de conscience lié à la notion de plaisir est essentiel pour pratiquer de manière régulière et surtout, transmettre le plaisir de l’aikido autour de nous !
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Conclusion : ode à une pratique accessible à tous

Florence Poupard en pleine action à l’Université d’été de la FFAAA, sous le regard de Frantz Martinache
Voici donc mon ode à une pratique martiale rendant le plaisir accessible à tous.
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Gardons ceci en tête : 
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Le plaisir est stimulé par un cadre bienveillant,
Le plaisir peut-être accessible aux débutants
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Alors relevons le défi, et donnons à nos néophytes l’envie de débuter,
Donnons à nos débutants l’envie de rester,
Donnons à nos jeunes l’envie de se mélanger avec les plus âgés,
Donnons à nos adhérents l’envie de convier leurs proches à un cours d’essai
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Remettons le plaisir au coeur de la pratique martiale
Il ne s’agit pas de dénaturer l’aikido de son essence,
Mais de comprendre que le plaisir peut lui redonner tout son sens.
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Bonne réflexion,
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