Dans notre premier chapitre, nous (Yéza Lucas et Stéphane Ethève) avons partagé notre réflexion sur la vision moderne de l’Aïkido, en réponse aux commentaires “traditionnalistes” que nous avons observés sur Facebook.

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Dans notre deuxième chapitre, nous avons partagé notre vision sur les enjeux de la communication de l’Aikido auprès du grand public.

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Dans ce troisième chapitre, nous allons nous pencher sur l’esprit de l’Aïkido et les valeurs qu’il véhicule, à la fois sur et en dehors du tatami. Après avoir discuté de la vision moderne de l’Aïkido et des enjeux de communication dans le chapitre précédents, nous explorons ici ce que signifie véritablement l’esprit “Aiki” : la bienveillance, la maîtrise de soi, et la recherche d’harmonie sur les tatamis (et en dehors). Comment ces principes sont-ils incarnés par les pratiquants, les enseignants, et les structures ? Qu’est-ce qu’un “grand sensei” au-delà de la simple technicité ? Et enfin, quelles sont les dérives ou les comportements qui peuvent parfois trahir cet esprit et nuire à l’attractivité de la discipline ? Autant de questions que nous tenterons de clarifier à travers notre expérience et notre réflexion.

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La voie authentique en Aïkido 

 

  • C’est quoi un grand sensei  ?

image générée par Dall-E 3

 

Yéza Lucas : 

 

Certains diraient que c’est un haut gradé. Pour moi, ce n’est pas tout ça. C’est une personne humainement accessible, bienveillante, humble, qui oeuvre à transmettre sa pédagogie et sa passion pour l’aïkido. J’irais même jusqu’à dire qu’il a créé des contenus pour apporter sa contribution à la discipline ! 

 

Stéphane Ethève : 

Pour moi, un grand sensei, c’est bien plus qu’un simple expert technique. Certes, je pourrais plaisanter en disant que c’est quelqu’un qui mesure plus de 1,80 mètre, mais la réalité est bien plus profonde. Un grand sensei se distingue d’abord par sa technicité. Il maîtrise les mouvements, les principes de l’Aïkido et sait les appliquer de manière fluide et efficace. Cependant, cela ne suffit pas. Je pense qu’on peut être un très bon technicien sans pour autant être un bon enseignant. La pédagogie est essentielle. Un grand sensei doit savoir transmettre ses connaissances et s’adapter aux besoins de ses élèves.

À mon avis, ce qui fait vraiment la différence, c’est la personnalité d’un grand sensei. Il doit être charismatique, capable d’inspirer ses élèves et de créer une atmosphère positive dans le dojo. L’empathie est aussi cruciale. Un bon sensei doit être à l’écoute de ses élèves, comprendre leurs difficultés et les encourager dans leur progression. Je crois qu’il est essentiel qu’il soit rigoureux dans sa pratique, car cela montre l’exemple et crée une culture de sérieux et de respect au sein du dojo.

Un autre aspect fondamental est la capacité à se remettre en question. Un grand sensei sait et accepte d’évaluer ses propres pratiques, d’apprendre de ses erreurs et d’évoluer. Cela montre une humilité et un engagement envers l’amélioration continue, non seulement pour lui-même, mais aussi pour ses élèves. 

En dehors de cela, il doit être exemplaire, tant dans le dojo qu’à l’extérieur. Les élèves observent et imitent souvent leurs enseignants, donc un grand sensei doit incarner les valeurs de l’Aïkido : respect, humilité et engagement. De plus, il est important qu’il soit attentif à la progression de ses élèves, non pas seulement en fonction de sa propre notoriété, mais véritablement pour leur épanouissement personnel.

En somme, pour moi, un grand sensei, c’est un mélange de technicité, de pédagogie, de charisme, d’engagement envers ses élèves et de capacité à se remettre en question. C’est cette combinaison qui crée un environnement d’apprentissage enrichissant et motivant, et c’est ce qui marque véritablement la différence dans la pratique de l’Aïkido.

Je ne sais pas si un tel sensei existe réellement, car atteindre ce niveau d’excellence demande un engagement et une évolution constants. Comme l’a dit le philosophe et écrivain Antoine de Saint-Exupéry : « Ce qui embellit le désert, c’est qu’il cache une fontaine quelque part. ». Cette citation me laisse suggérer que derrière chaque grand sensei, il y a une quête de profondeur et de connaissance qui va bien au-delà des apparences. Un grand sensei, tout en étant un modèle, est aussi en quête d’une sagesse qui transcende la simple technique. C’est cette recherche permanente qui rend la relation entre un sensei et ses élèves si précieuse et enrichissante.

 

  • L’aïkido de l’Aikikai : le seul, le vrai, et l’unique ?

Hombu dojo – avec Michael Thai

 

Yéza : 

 

L’aïkido de l’Aikikai ou Hombu Dojo est celui de la maison mère. Mais aujourd’hui, l’aïkido est pluriel et a su évoluer !

 

Pour moi, il y a un Aikido japonais. Et même plusieurs. Il y a un Aïkido français et ce serait faux de le nier. L’Aïkido s’adapte à l’époque et à la culture dans laquelle il se développe.  Il évolue, comme une langue, comme des mœurs et même comme des pratiques spirituelles.  Des paroles ou des mots capturés d’une époque et d’un contexte et rapportés à la vie moderne, sont à prendre avec des pincettes. La vraie question de fond pour moi est la suivante : quelle est l’essence de l’Aïkido ? Est-elle dans la technique ? Dans les valeurs ? Dans la relation au partenaire ?

 

C’est un répondant à la question que l’on peut voir ce qui doit rester, et ce qui peut évoluer.

Stéphane : 

Non, l’Aïkikai n’est pas la seule école d’Aïkido au Japon. Bien qu’elle soit la principale organisation représentant l’Aïkido fondée par Morihei Ueshiba, plusieurs autres écoles et organisations existent, chacune ayant développé sa propre approche ou interprétation de la discipline. Le Yoshinkan Aïkido, fondé par Gozo Shioda, se distingue par une approche plus rigoureuse et martiale, axée davantage sur la self-défense. Le Shodokan Aïkido, fondé par Kenji Tomiki, introduit une dimension qui n’existe normalement pas dans l’Aïkido : la compétition sportive. L’Iwama Ryu, créé par Morihiro Saito, met un accent particulier sur la pratique des armes et la fidélité aux enseignements traditionnels d’Iwama, où Ueshiba a passé une partie de sa vie. Enfin, il y a le Shin’ei Taido, développé par Noriaki Inoue, un cousin de Morihei Ueshiba, qui propose une vision distincte mais proche de l’Aïkido.

Ces exemples montrent que l’Aïkido a évolué sous différentes formes au Japon et ailleurs. Selon moi, il est important de comprendre que si beaucoup de fédérations, comme la FFAAA, se revendiquent de l’Aïkikai, nous pratiquons un art martial japonais dans un contexte culturel occidental. Ça change forcément la façon dont nous abordons cet art. Les sensei français, tout comme les sensei japonais, font évoluer leur pratique en fonction de leur expérience de vie et de leur propre vision de l’Aïkido. Parfois, leurs élèves n’ont jamais mis les pieds au Japon (je pense à certains de mes élèves, et moi-même d’ailleurs). Leur Aïkido n’est pas celui de la “maison mère” à Tokyo, mais plutôt celui de leur sensei français. Bien sûr, beaucoup ont participé à des stages d’experts japonais en France, mais ce type d’apprentissage n’est rien comparé à ce qu’un élève peut recevoir de son propre enseignant au quotidien.

Cela dit, je pense qu’il est essentiel de garder à l’esprit que, malgré ces différentes interprétations et adaptations, l’Aïkido reste, et restera toujours, un art martial japonais. Quelle que soit la façon dont chacun le conçoit ou l’enseigne, cette origine là ne changera jamais. L’Aïkido est ancré dans la culture japonaise, et c’est cet héritage qui lui donne sa profondeur et son identité unique.

Pour moi, l’Aïkido est comme un langage universel avec ses différentes langues et dialectes. Chaque école, chaque sensei, chaque pratiquant apporte sa propre touche, mais au final, nous partageons tous les mêmes principes fondamentaux. Pour bien comprendre l’autre, il faut parfois accepter qu’il ne “parle” pas exactement la même langue que nous et être prêt à apprendre de ses différences. C’est cette diversité qui, à mon avis, enrichit l’Aïkido, tout en respectant ses racines japonaises inaltérables.

 

L’aïkido et les détracteurs de sa popularité : 

 

  • Quels comportements ou pratiques desservent l’attractivité de la discipline aujourd’hui ?


Yéza : 

 

Pour moi, il s’agit des comportements prônant la suprématie d’un aïkido du passé, ou plus japonais que les  japonais. Ou encore, des comportements réprimant la parole des moins gradés qui seraient moins légitimes. En tant que femme, jeune et 2ème dan, je me prends régulièrement les foudres de mes détracteurs sur les réseaux sociaux. 

 

Je suis entrepreneure, et quand on entreprend, il faut accepter de déléguer ce qu’on ne maîtrise pas, ou encore de se former pour se mettre à la page. Si les egos ne dominaient pas les tatamis, peut-être l’humilité (valeur chère aux arts martiaux) pourrait-elle permettre aux enseignants de laisser la main à des adhérents plus qualifiés qu’eux en matière de communication par exemple.

 

Stéphane :

 

Je pense qu’il y a plusieurs comportements et pratiques qui peuvent desservir l’attractivité de l’Aïkido aujourd’hui. 

Tout d’abord, selon moi, le manque de communication et de transparence au sein des clubs est un véritable frein. Lorsque les pratiquants potentiels ne comprennent pas clairement les valeurs de l’Aïkido ou ce qu’ils peuvent en attendre, ils sont moins enclins à s’inscrire. Les clubs qui restent cloisonnés dans leur fonctionnement, sans s’ouvrir au dialogue avec le public, passent à côté d’opportunités précieuses pour attirer de nouveaux élèves.

Ensuite, certaines démonstrations de pratiques très stylisées ou chorégraphiées peuvent donner une image erronée de l’Aïkido. Bien que ces présentations soient impressionnantes et même utiles en termes de communication, elles peuvent créer l’impression que l’Aïkido est une discipline éloignée des capacités physiques de la majorité des gens. Cela peut amener les spectateurs à penser qu’ils ne pourraient jamais atteindre ce niveau, créant ainsi une barrière psychologique à l’entrée. Pour moi, il est essentiel de montrer l’Aïkido tel qu’on le pratique vraiment sur le tatami, avec ses défis et ses réalisations accessibles à tous.

Un autre point qui me semble crucial est l’attitude de certains enseignants d’Aïkido. Une approche trop rigide, voire élitiste, peut vite décourager les nouveaux pratiquants, surtout s’ils se sentent jugés ou non accueillis. Si un instructeur se concentre davantage sur son propre statut que sur le développement de ses élèves, il risque de donner l’impression que l’Aïkido est réservé à une minorité d’élite. Cela va à l’encontre des principes mêmes de notre discipline.

Un sensei n’est pas non plus un “guru”. Il est essentiel de comprendre que la relation entre un enseignant et ses élèves ne doit pas reposer sur une forme de féodalisation ou d’asservissement. Dans certains cas, on observe un attachement excessif des élèves à leur sensei, créant un climat où ils se sentent obligés de suivre son influence de manière exclusive. C’est une dynamique malsaine, car les élèves ne “n’appartiennent” pas au sensei.

Un bon enseignant doit encourager ses pratiquants à explorer différents styles, à s’ouvrir à d’autres sensei et à d’autres perspectives, sans que cela soit perçu comme une trahison ou un manque de reconnaissance. L’Aïkido, en tant qu’art martial, repose sur l’idée de partage et de croissance personnelle. Chaque pratiquant doit être libre d’évoluer, de découvrir de nouvelles approches, et cela peut se faire en dehors de la sphère d’influence d’un sensei sans sentiment de culpabilité.

Pour moi, l’essence même de l’Aïkido, c’est ce respect mutuel et cette liberté d’évolution qui permet à chacun de s’épanouir dans la pratique

Il existe aussi une attitude hautaine chez certains enseignants hauts gradés qui nuit pour moi à l’image de l’Aïkido. Ces sensei, convaincus d’être les seuls dépositaires de la vérité, adoptent souvent une posture élitiste. Ils pensent avoir raison sur tout et pour tout le monde. Cette attitude ne laisse pas de place au dialogue ou à la remise en question, qui sont pourtant essentiels pour une pratique vivante et évolutive.

Je constate aussi une tendance chez certains enseignants à se concentrer sur un Aïkido traditionnel, au détriment de l’adaptabilité et de l’évolution. Cette vision passéiste peut donner l’impression que la discipline est figée dans le temps, excluant ainsi ceux qui cherchent à l’aborder de manière moderne ou différente. Pour moi, l’Aïkido doit évoluer avec son temps pour rester pertinent et attractif. Se cantonner à une vision strictement traditionnelle peut éloigner des pratiquants potentiels.

Après tout, Morihei Ueshiba, lorsqu’il a créé l’Aïkido, avait lui-même une approche moderne de la pratique martiale. Il a su transformer le Daito-Ryu, qui existe toujours, en y intégrant des éléments plus spirituels et moins guerriers, adaptés à l’époque et à sa propre philosophie. Ce mouvement d’innovation à ma connaissance n’a pas pour autant suscité de rejet violent de la part du Daito-Ryu, qui a continué à exister sans pour autant “cracher” sur Ueshiba pour ses choix d’évolution !

De mon opinion, cela montre que l’évolution est intrinsèque à l’histoire même de l’Aïkido. Refuser d’adapter la discipline aujourd’hui est pour moi contraire à cet esprit d’ouverture et de transformation qu’a insufflé son fondateur. De la même manière que Ueshiba a su moderniser son approche, il incombe au sensei de réfléchir à ce que peut être un Aïkido pertinent pour les nouvelles générations.

Le sectarisme de certains enseignants est également problématique. En se regroupant autour de leurs propres interprétations, ils peuvent créer des clivages au sein de la communauté Aïkido, engendrant un sentiment de division qui peut rebuter ceux qui souhaitent pratiquer dans un esprit d’ouverture et de partage. Certaines pratiques trop métaphysiques, souvent promues par ces enseignants, peuvent sembler inaccessibles ou abstraites pour ceux qui recherchent une approche plus concrète et pragmatique de l’Aïkido.

Pour moi, il est crucial que les enseignants, surtout ceux de haut niveau, adoptent une attitude d’humilité et d’ouverture. Ils devraient valoriser le dialogue et encourager les échanges d’idées, quelles que soient les différences d’opinion. En intégrant des perspectives variées et en étant réceptifs aux évolutions de la pratique, ils contribueraient à enrichir l’Aïkido et à en faire une discipline plus inclusive et attrayante pour tous.

Je suis également préoccupé par la focalisation excessive sur les grades et les récompenses. La course aux grades et aux diplômes peut souvent créer un climat malsain, où l’obtention de la prochaine ceinture devient plus importante que l’apprentissage réel et le développement personnel. Cette obsession pour les grades peut entraîner des comportements où les pratiquants cherchent à accumuler des titres plutôt qu’à approfondir leur compréhension de l’Aïkido. Pour moi, cela détourne l’attention des valeurs fondamentales de la pratique, telles que la progression personnelle, le respect et l’humilité.

Lorsque l’accent est mis principalement sur l’obtention de ceintures ou de diplômes, cela peut également créer une hiérarchie rigide au sein des clubs, où les élèves se sentent sous pression pour “performer” et satisfaire les attentes des enseignants. Cela peut rendre l’expérience de la pratique moins agréable et plus stressante, surtout pour les nouveaux arrivants qui pourraient se sentir intimidés par ce système de classement. Je crois fermement que l’apprentissage et le développement personnel devraient primer sur cette compétition pour les grades, permettant ainsi à chacun de progresser à son propre rythme.

En ce qui concerne l’intégration de l’Aïkido dans des programmes scolaires ou des événements communautaires, je pense que la volonté politique, tant au sein des fédérations que de l’Éducation nationale, est très timide.. Il existe de nombreuses possibilités d’introduire les valeurs éducatives et les bienfaits de l’Aïkido dans divers environnements, mais si nous ne prenons pas ces occasions, nous risquons de rater une chance de nous faire connaître.

Intégrer l’Aïkido dans les écoles pourrait non seulement faire découvrir la discipline à de nouveaux pratiquants, mais aussi promouvoir des valeurs telles que le respect, la discipline, et le travail d’équipe auprès des jeunes. Par exemple, des ateliers d’Aïkido pourraient être organisés dans les écoles pour enseigner aux élèves non seulement des techniques physiques, mais aussi des compétences en matière de gestion du stress et de développement personnel. Cela offrirait aux jeunes une alternative constructive aux activités parfois plus compétitives ou individualistes de la culture sportive actuelle.

Je pense qu’il serait bénéfique d’initier des partenariats entre les clubs d’Aïkido et les établissements scolaires pour renforcer la visibilité de la discipline. Ces collaborations pourraient inclure des démonstrations, des stages ou des cours d’initiation, permettant aux élèves de vivre l’Aïkido dans un cadre familier et sécurisant. Pour moi, ces initiatives pourraient non seulement attirer de nouveaux pratiquants, mais aussi renforcer le lien entre l’Aïkido et la communauté scolaire, en le présentant comme une discipline enrichissante et bénéfique pour le développement des jeunes.

En résumé, je crois qu’une meilleure communication, une approche plus accessible et inclusive, ainsi qu’un retour aux valeurs fondamentales de l’Aïkido pourraient grandement améliorer son attractivité.

 

  • On dit que la politique discrédite l’aïkido : vrai ou faux  ?


Yéza :

 

Tout projet de développement de l’aïkido découle d’une vision, et donc d’une politique (même si elle n’est pas partisane). Lorsqu’on porte une vision autour du rayonnement de l’aïkido, d’un projet valorisant la pédagogie jeune, ou rendant l’aïkido accessible ou populaire, on est porteur d’une vision politique de la discipline. 

 

En revanche, ce qui discrédite l’aïkido, ce sont les querelles d’ego. Car l’égo ne fait pas du bien au projet politique, au contraire ! Les egos peuvent parfois se mettre en travers du chemin en faisant jaillir des flots d’orgueil sous fond de rivalité. 

 

Et pourtant, l’aïkido renforce la confiance en soi, la maîtrise de soi, et devrait permettre à tout un chacun d’être plus serein, et de croire en sa propre valeur sans se sentir menacé par l’autre.

 

Stéphane :

À mon avis, il est inexact de dire que la politique discrédite l’Aïkido. Tout projet ou initiative au sein de la discipline découle d’une vision politique, et comme nous sommes organisés en fédération, cela implique nécessairement des choix et des orientations qui peuvent être sujets à débat. Certains adhèrent à ces choix politiques, tandis que d’autres se sentent exclus ou en désaccord, ce qui crée une dynamique parfois conflictuelle.

Pour moi, le problème ne réside pas dans la politique elle-même, mais plutôt dans les batailles d’ego qui l’accompagnent. Je constate que certains enseignants et techniciens, convaincus d’être les gardiens de la vérité, sont prêts à se disputer sur qui détient le savoir ultime. Cette compétition (elle existe finalement en Aïkido!) pour établir qui est le “suprême” dans la pratique peut être destructrice. Cela entraîne une résistance au changement, avec certains enseignants qui refusent de voir l’Aïkido évoluer en dehors de leur sphère d’influence. Cette situation selon moi nuit à l’évolution de l’Aïkido et contribue à créer une culture où la remise en question et le dialogue sont absents. Je crois fermement que la véritable essence de l’Aïkido réside dans l’ouverture d’esprit et le partage des connaissances.

De mon point de vue, ces rivalités engendrent des batailles de clocher, où chaque groupe cherche à défendre son territoire et ses méthodes, au détriment de l’unité de la discipline. Cela aboutit aujourd’hui à des divisions au sein du groupe FFAAA (c’est de ça qu’il s’agit véritablement) où les pratiquants se retrouvent dans des camps opposés, ce qui nuit au final à l’image même de la discipline.. En fin de compte, cela peut dissuader de nouveaux pratiquants de rejoindre l’Aïkido, car ils peuvent percevoir cette atmosphère conflictuelle comme peu accueillante.

Je pense qu’il est crucial que les enseignants et les dirigeants de fédérations adoptent une approche plus collaborative. À mon avis, l’accent devrait être mis sur la promotion d’un dialogue ouvert et constructif, où les idées peuvent être partagées sans jugement ni rancœur. Cela pourrait permettre de trouver un terrain d’entente et de favoriser une évolution positive de l’Aïkido, tout en respectant les diverses approches qui existent.

En somme, je crois que la politique en soi n’est pas un problème, mais la manière dont elle est vécue et comprise l’est. Si nous pouvons dépasser les rivalités personnelles et privilégier l’intérêt commun, l’Aïkido pourrait vraiment évoluer vers une discipline plus inclusive et enrichissante pour tous ses pratiquants. 

Une citation qui pourrait bien illustrer cette idée est celle de Mahatma Gandhi : « La force ne provient pas des capacités physiques, mais d’une volonté indomptable ». Pour moi, cette citation souligne l’importance de l’esprit et de la volonté collective dans le développement et l’évolution d’une discipline comme l’Aïkido, plutôt que de se laisser entraîner par des rivalités personnelles ou des luttes de pouvoir. Elle nous rappelle que c’est la collaboration et la détermination à progresser ensemble qui peuvent réellement faire avancer la pratique. À bon entendeur !

 

  • C’est quoi l’esprit aiki ?


Yéza : 

 

Ça fait plusieurs années que j’entends parler de l’esprit Aiki, comme une expression résumant les valeurs de bienveillance de l’Aïkido.

 

Comme j’ai pu le constater depuis que je suis sur les tatamis, il y a clairement des problématiques d’ego, sûrement du fait que nous n’avons pas de compétition franche opposant deux adversaires.

 

Encore une fois, j’ai écrit plusieurs posts et articles sur le sujet. Le constat est désolant.

 

Sans chercher à me victimiser, en tant que jeune, femme, et peu gradée, je m’en suis pris plein la figure (au sens propre comme figuré) et c’est toujours le cas. 

 

Au sens propre, sur les tatamis, quand mes partenaires sont incapables de doser leurs attaques, de les retenir, ou de s’adapter à mon gabarit. Il m’arrive régulièrement de demander à ce qu’on ménage mes poignets sur certaines contraintes articulaires par exemple. 

 

Au sens figuré dans de nombreux commentaires sur les réseaux sociaux (qui ont contribué à la rédaction de cet article). Bien sûr, les haters comme on les appelle, ne sont pas propre à l’aïkido, mais c’est tout de même un comble pour une discipline martiale qui prône la bienveillance, la maîtrise de soi et la préservation de l’intégrité de l’autre, de constater ce déversement de haine sans retenue.

 

Je viens de résumer ici ce que n’était pas l’esprit Aiki pour moi.

 

Sur une note plus positive, l’esprit Aiki, c’est pour moi un esprit de solidarité entre les pratiquants sur le tatami, et en dehors, un esprit de vie sociale pour créer du lien. 

 

Grâce à l’aïkido, un esprit de partage pour échanger des réflexions dans le dialogue et la bienveillance, mais également pour s’entraider au niveau de la pratique ou contribuer ensemble au développement de l’Aïkido.

 

Je fais souvent le parallèle entre l’aïkido et l’entrepreneuriat, même si ce sont des milieux totalement différents.

 

Dans l’entrepreneuriat, j’ai rapidement appris que les concurrents n’étaient pas des ennemis et que nous pouvions même collaborer ensemble.  

 

J’ai également appris que cacher son produit ou restreindre l’accès au savoir était la pire manière de se développer car un produit caché ne permet pas de bénéficier des retours de futurs clients.

 

Malheureusement, dans l’Aikido, l’autre est souvent perçu comme un concurrent, surtout dans le cadre de la professionnalisation de la pratique. Et c’est insensé dans une discipline où il n’y a pas de compétition.

 

Dans un milieu associatif, sans compétition, où l’on parle d’harmonie, je ne comprends pas pourquoi cela n’est toujours pas appliqué dans les faits au quotidien.

 

Pour conclure, l’esprit Aiki, c’est pour moi, appliquer les principes philosophiques et les valeurs de la discipline sur les tatamis, dans son quotidien, et même en ligne sur Internet. 

 

Les Haters ont tendance à oublier qu’ils se défoulent entre des humains.

 

Dans l’esprit Aiki, le courage prime sur la lâcheté. 

Dans l’esprit Aiki, l’échange prime sur l’agressivité.

Dans l’esprIt Aiki, l’ouverture prime sur la rigidité

Dans l’esprit Aiki, la confiance en soi prime sur la peur de l’autre. 

 

Stéphane :

Je pense que l’esprit Aiki repose avant tout sur des valeurs d’harmonie, de respect mutuel et de collaboration, qui doivent s’appliquer non seulement sur le tatami, mais aussi en dehors du dojo. À mon avis, il ne s’agit pas simplement d’une question de technique, mais d’un comportement global qui se reflète dans nos interactions quotidiennes. Il est regrettable que certains, au sein de la fédération ou sur les réseaux sociaux, semblent plus préoccupés par des luttes de pouvoir que par ces valeurs essentielles. C’est d’autant plus problématique lorsque certains sensei, censés incarner ces principes, agissent en contradiction avec ce qu’ils enseignent.

Une des grandes problématiques actuelles au sein de la fédération réside dans ces querelles internes alimentées par des luttes d’influence. Plutôt que de se concentrer sur l’harmonisation et la transmission de l’Aïkido, certains semblent plus soucieux de protéger leur sphère d’autorité. Je suis certain que ces personnes refusent de voir leur position diminuer et s’opposent farouchement à tout changement qui pourrait remettre en question leur statut. Ce comportement est en totale contradiction avec l’esprit Aiki, qui prône le partage et l’ouverture d’esprit.

Je constate également que l’usage des réseaux sociaux pour déverser des critiques acerbes est en plein essor. L’esprit Aiki, ce n’est pas cracher son venin dans des commentaires, mais critiquer de manière constructive et intelligente. Il est important d’argumenter et de proposer des solutions alternatives, plutôt que de s’abandonner à des attaques personnelles. La critique, lorsqu’elle est bienveillante, peut être un levier d’évolution pour la communauté.

Je pense que ces attitudes créent un climat de tension. Plutôt que d’encourager le dialogue constructif, certains choisissent l’affrontement pour protéger leurs intérêts personnels. Ils s’opposent aux nouvelles idées et réformes proposées par les jeunes générations, en se cantonnant à un modèle rigide où seuls les “anciens” sont vus comme de véritables experts. À mon avis, ce refus d’accepter le renouvellement est non seulement dommageable, mais également en contradiction avec l’histoire même de l’Aïkido, qui a toujours su évoluer.

« L’histoire est une aiguille qui sert à endormir les hommes trempées dans le poison de ce qu’ils veulent garder » – Léonard Cohen

« Pour progresser, il ne faut pas répéter l’histoire mais en produire une nouvelle. Il faut ajouter à l’héritage que nous a laissé nos ancêtres » – Mahatma Gandhi

Ces deux citations apportent des perspectives intéressantes sur l’importance de l’évolution et du changement face à l’attachement au passé. La citation de Léonard Cohen souligne que l’histoire peut parfois être utilisée pour « endormir » les hommes, en les enfermant dans un confort sécurisant mais toxique. L’idée est que s’accrocher aveuglément au passé peut devenir un frein au progrès, surtout si ce passé est teinté de l’idée que seul ce qui a été fait est valable. Dans le contexte de l’Aïkido, cette attitude peut être observée chez ceux qui s’opposent aux nouvelles idées, préférant protéger un modèle rigide. 

De mon point de vue, ce refus d’accepter le changement et de s’ouvrir aux perspectives des nouvelles générations est en contradiction avec l’essence même de l’Aïkido, qui a toujours été une discipline évolutive et donc en contradiction avec l’esprit Aïki. En restant figés dans une tradition, certains pratiquants créent un climat de tension et d’affrontement. Plutôt que d’encourager un dialogue constructif, ils choisissent de s’opposer à toute réforme, comme s’il y avait un danger à intégrer de nouvelles idées dans leur pratique.

La citation de Mahatma Gandhi renforce cette idée, en affirmant que pour progresser, il ne faut pas se contenter de répéter l’histoire, mais en créer une nouvelle. Selon moi, cela correspond parfaitement à la dynamique de l’Aïkido et donc à l’esprit Aïki. Il est essentiel de respecter l’héritage que nos ancêtres nous ont laissé, mais il faut aussi savoir l’enrichir, y ajouter notre propre contribution. Ce renouvellement perpétuel est ce qui fait vivre l’Aïkido et permet à la discipline de se développer et de s’adapter au monde moderne.

De mon point de vue, les comportements rétrogrades, qui s’opposent aux réformes, finissent par affaiblir l’Aïkido en restreignant sa portée et en limitant sa capacité à attirer les nouvelles générations. L’évolution est une force, et la capacité de l’Aïkido à s’adapter, tout en restant fidèle à ses principes, est ce qui le rend pertinent dans notre société actuelle. En résistant à ce changement, les attitudes rigides finissent par nuire à la communauté Aïkido et à l’avenir même de la discipline.

Ces querelles internes, de mon point de vue, étouffent les initiatives innovantes et freinent l’évolution de l’Aïkido. De nombreux pratiquants, notamment les jeunes ou ceux ayant une approche différente, se retrouvent alors exclus. Cela engendre un blocage où toute proposition de changement est perçue comme une menace, plutôt qu’une opportunité d’enrichir la pratique. À mon avis, cette mentalité va à l’encontre de l’esprit d’harmonie et de bienveillance.

Ces luttes de pouvoir créent des divisions au sein de la communauté. Plutôt que d’accepter que l’Aïkido soit une discipline vivante et en constante évolution, certains s’enferment dans une vision passéiste, négligeant les bénéfices que les nouvelles idées pourraient apporter. Cela empêche une véritable collaboration entre générations. L’Aïkido, en tant qu’art martial et philosophie, devrait nous enseigner à harmoniser nos divergences pour avancer ensemble.

Je suis certain que, si ces résistances persistent, elles pourraient avoir des répercussions négatives sur l’avenir de la discipline. L’Aïkido ne pourra évoluer que si ceux qui détiennent l’autorité acceptent de partager leur savoir et d’ouvrir la porte aux nouvelles générations. Cela nécessite de reconnaître que l’Aïkido ne doit pas être figé dans le temps, mais s’adapter à la société contemporaine tout en restant fidèle à ses valeurs fondamentales. 

L’esprit Aiki, selon moi, c’est avant tout s’entraider et partager ses connaissances sans chercher à les monétiser. Il s’agit de transmettre avec générosité pour que chacun puisse progresser. Être attentif aux autres est essentiel, qu’il s’agisse de néophytes, de gradés, de débutants ou des personnes œuvrant en coulisses. L’Aïkido est une communauté où chacun a sa place.

L’esprit Aiki consiste aussi, j’en suis convaincu, à projeter ; projeter  avec l’autre (surtout lorsqu’il est différent ou pense différemment), c’est-à-dire construire ensemble et créer des projets communs. Ce n’est qu’en collaborant de manière constructive que l’on peut évoluer. Malheureusement, certains choisissent l’affrontement systématique, sans s’ouvrir aux nouvelles idées ni reconnaître la place des jeunes générations. Cette résistance va à l’encontre de l’harmonie que prône l’Aïkido.

L’esprit Aiki, c’est aussi reconnaître la valeur de chacun, y compris celle des moins gradés, car c’est en acceptant la diversité que l’on avance ensemble. Pour moi, l’esprit Aiki va bien au-delà de la simple technique martiale. C’est une philosophie de respect mutuel, où chaque pratiquant, peu importe son grade, a une valeur unique à apporter. Trop souvent, on met l’accent sur les grades et l’expérience pour définir la légitimité d’une personne. Mais de mon point de vue, ce qui fait la richesse de l’Aïkido, c’est justement la diversité des parcours, des niveaux, et des expériences.

Les moins gradés, par leur fraîcheur et leur perspective différente, ont parfois des questionnements ou des approches qui remettent en cause nos certitudes et nous obligent à réfléchir autrement. Ils apportent une énergie et une dynamique qui contribuent à faire évoluer le groupe. L’esprit Aiki, c’est donc aussi savoir écouter, apprendre des autres, quel que soit leur niveau.

C’est en acceptant cette diversité et en valorisant chaque contribution que l’on avance ensemble. Selon moi, si l’Aïkido se résumait à une hiérarchie rigide, il perdrait de sa profondeur. Au contraire, c’est l’ouverture d’esprit et le respect de chacun qui font sa force et permettent à la discipline d’évoluer de façon harmonieuse.

 

Pour moi, l’esprit Aiki, c’est avant tout pratiquer dans un état d’esprit de collaboration, sans jamais chercher à dominer ou à imposer sa force. L’Aïkido nous enseigne que la véritable maîtrise ne réside pas dans la puissance physique, mais dans l’harmonisation des mouvements entre tori et uke. Quand on est en phase avec son partenaire, on ressent une fluidité naturelle, une sorte de connexion qui rend la technique plus efficace et agréable pour les deux.

Il ne s’agit pas de forcer l’autre à se soumettre à notre volonté, mais plutôt de trouver cet équilibre où les mouvements s’accordent. Lorsque les échanges techniques se déroulent bien et que chacun en ressort avec un ressenti positif, c’est le signe que les principes Aiki ont été respectés. Cela signifie qu’il y a eu bienveillance et respect dans l’interaction, ce qui est essentiel.

De mon point de vue, l’esprit Aiki devrait être ce qui guide en permanence notre pratique. Il doit être le fil conducteur de chaque mouvement, de chaque interaction, que ce soit dans l’apprentissage des techniques ou dans notre attitude envers les autres. Cela passe par la bienveillance, le respect mutuel et la capacité d’échanger, pas seulement physiquement, mais aussi dans l’écoute et l’attention que l’on porte à son partenaire. Au final, c’est cet état d’esprit qui nous permet de progresser ensemble, sans rivalité ni domination.

 

Pour moi, l’esprit Aiki est l’opposé de tout comportement agressif ou belliqueux. L’Aïkido nous enseigne précisément à désamorcer les conflits, à créer des relations respectueuses et harmonieuses. Ce n’est pas seulement sur le tatami que cela s’applique, mais aussi dans notre quotidien. Nous ne cherchons pas à gagner ou à vaincre l’autre, mais à trouver une solution qui permet de rétablir l’équilibre.

De mon point de vue, l’honnêteté joue un rôle fondamental dans cet esprit. Il ne s’agit pas simplement de dire ce que l’on pense, mais de le faire sans haine, sans violence. Il est tout à fait légitime d’exprimer un désaccord, et cela ne doit pas être perçu comme une attaque. L’important, c’est la manière dont on le fait : avec respect, et dans l’idée de construire un échange qui mène à une meilleure compréhension mutuelle.

L’esprit Aiki, c’est aussi avoir le courage d’être honnête tout en restant bienveillant. Il ne s’agit pas d’être passif ou de se taire pour éviter les conflits, mais de s’exprimer de façon réfléchie, sans se laisser emporter par la colère. À mon avis, la lâcheté consiste justement à céder à cette impulsion de déverser sa frustration ou sa rage sans réfléchir aux conséquences. Cela ne mène nulle part et ne résout rien. Au contraire, l’esprit Aiki nous pousse à prendre du recul, à réfléchir, et à choisir nos mots et nos actions avec sagesse, pour que l’échange soit bénéfique à tous.

 

De mon point de vue, l’esprit Aiki s’incarne parfaitement dans la philosophie “ubuntu”, qui se résume par la phrase : « Je suis ce que je suis grâce à ce que nous sommes tous». Cette idée traduit une interdépendance entre les individus, un lien profond qui nous unit tous et qui, à mon sens, est aussi au cœur de l’Aïkido. En pratiquant l’Aïkido, nous apprenons que nous ne progressons jamais seuls. Nous avançons grâce aux autres, grâce aux échanges que nous avons avec nos partenaires. Chacun joue un rôle dans l’évolution de l’autre.

Sur le tatami, cette collaboration est évidente : tori et uke sont interdépendants. C’est en travaillant main dans la main, en cherchant l’harmonie plutôt que la domination, que nous réussissons à nous améliorer mutuellement. C’est exactement la même chose dans la vie quotidienne : c’est en créant des ponts, en ouvrant des canaux de communication et de compréhension, plutôt qu’en érigeant des barrières, que nous pouvons véritablement prospérer.

Pour moi, l’Aïkido ne se limite pas à une série de techniques, mais est une véritable école de vie qui nous enseigne à pacifier nos relations, à encourager le dialogue, et à évoluer ensemble. En revenant à l’essence même de cet art, à savoir la recherche de l’harmonie et du respect mutuel, nous permettons à l’Aïkido de grandir, non seulement en tant que pratique martiale, mais aussi comme un moyen de renforcer les liens entre les individus. C’est ainsi que l’Aïkido pourra prospérer, en restant fidèle à cette idée de coopération et d’évolution commune.

 

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