L’aikido est un art martial dont la pratique a évolué depuis sa création. Mais si les formes ont connu des transformations, il y a des choses sur lesquelles la pratique ne bouge pas et sur lesquelles je m’interroge : pourquoi évaluer seulement un tori et non un uke ? A quoi correspond la remise du hakama pour un pratiquant ? D’ailleurs, le port du hakama fait-il encore sens aujourd’hui ? Et la pratique des armes au XXIème siècle ? Plus généralement, qu’est-ce qui constitue l’essence de l’aikido dans la mesure où il a déjà muté depuis sa création ? Dans cet article, je passe en revue ces pistes de réflexion pour y apporter ma contribution.

L’Histoire de l’aikido est-elle essentielle à la pratique de la discipline ?


Si elle n’est pas nécessaire à la reproduction des gestes, elle est essentielle à qui recherche le sens de la technique et son évolution.

Si ignorer l’Histoire d’un pays n’empêche pas de vivre son quotidien, comprendre le passé permet de donner du sens au monde dans lequel on vit.

Et c’est la même chose sur un tatami :

– Pourquoi pratique-t-on en suwari waza ?

– Pourquoi l’aikido ne propose pas de compétition ?

– Pourquoi les techniques sont-elles aussi circulaires et complexes ?

– Le port du hakama fait-il encore sens quand son objectif n’est pas de cacher les pieds du pratiquant ?

Ce n’est pas la réponse à ces questions qui fera de l’aikidoka un bon technicien. En revanche, ces réponses lui permettront de donner du sens à sa pratique, et qui sait, de la faire évoluer.

Car l’aikido d’aujourd’hui n’est pas le même qu’hier,
L’aikido d’Orient n’est pas le même que celui d’Occident.

Quand l’Histoire de l’aikido nous est contée, c’est un moment de transmission qui nous est proposé.

Quand l’Histoire de l’aikido nous est contée, elle nous remet les clés de compréhension de la discipline.

Quand l’Histoire de l’aïkido nous est contée, elle ouvre la voie à une pratique renouvelée.

Et pour découvrir l’Histoire de l’aïkido, je vous invite à suivre les cours de Pierre Fissier au Kuroba ! 

Pratique : et si on évaluait le rôle de Uke ?

En aikido, tout pratiquant qui souhaite passer des grades sera évalué en tant que Tori, c’est-à-dire, celui qui reçoit des attaques et place une technique.

Et pourtant, Tori ne peut passer ses techniques sans la contribution de uke. Car oui, l’aikido se pratique à deux !

– En tant qu’Uke, nous apprenons à nous rendre plus disponible pour recevoir les techniques de Tori

– En tant qu’Uke, nous apprenons à garder contact avec Tori et assurer une réelle présence pour aider Tori à réaliser ses techniques

– En tant qu’Uke, nous apprenons à challenger Tori en le bloquant, s’il est mal placé ou si sa technique semble fragile.

Mais au final, c’est Tori qui sera sanctionné si Uke attaque mal lors d’un passage de grade
C’est Tori qui devra s’adapter si uke ne sait pas recevoir la technique
C’est Tori qui devra improviser si uke ne connait pas la nomenclature des noms de techniques

Le rôle d’Uke est essentiel dans la pratique de l’aikido. Son rôle est tout aussi important que celui de Tori dans une discipline basée sur un principe d’harmonie et d’équilibre.

Mais en tant qu’Uke nous ne sommes jamais évalués en tant que tel.

Alors pourquoi ne pas évaluer Uke de la même manière qu’on évalue Tori ?
Tout comme un aikidoka progresse en tant que Tori en passant des grades, il pourrait également progresser en tant qu’Uke en se soumettant à une évaluation similaire.

Remise du hakama : trouver le juste équilibre entre confiance en soi et niveau technique

Depuis que je pratique l’aïkido, j’observe que les règles d’obtention du hakama changent en fonction des dojos :

– 3ème kyu pour les uns
– 2ème pour les filles pour certains
-1er pour tout sexe confondu, pour une autre partie des clubs

Certains clubs décident de donner le hakama tôt (3ème kyu) quand l’élève maîtrise les principes de bases et les chutes. Ce hakama lui donne confiance, droiture, reconnaissance et lui confère un devoir d’exemplarité. Il devient officiellement le sempai des nouveaux débutants. Dans ce contexte, l’élève s’habitue plus tôt au port de ce nouvel accoutrement.

D’autres attendent un niveau technique plus confirmé pour remettre le hakama à leurs élèves. Dans ce cadre, le hakama devient le symbole d’une meilleure maîtrise de la discipline, et une récompense d’années de travail rigoureux.

Mais ces deux logiques sont également à double tranchant :

– Si donner un hakama tôt permet aux élèves de développer une bonne posture et renforcer leur niveau de confiance, il gomme aussi les défauts techniques grâce à une opacité au niveau des déplacements. Et ces défauts devront toutefois être corrigés et les corrections intégrées en vue des passages de dan.

– Si donner un hakama à l’approche du premier dan confère aux élèves un bon niveau technique, ces derniers auront mis plus de temps à développer une droiture, à se familiariser avec ce nouvel accoutrement et affirmer leur confiance sur le tatami.

Alors y a-t-il une bonne solution ?

Chaque club a son école, mais il serait intéressant de garder en tête la bonne évolution des élèves grâce à un équilibre entre développement de la confiance en soi et maîtrise d’un bon niveau technique.

Conclusion : faire évoluer l’aikido, sacrilège ou évidence ?

J’aimerais proposer une nouvelle réflexion sur l’avenir de l’aikido. Un avenir qui passe selon moi par une transformation.

Depuis ses débuts, l’aikido a connu des évolutions tant dans sa philosophie que dans ses formes. il a su s’adapter au contexte historique et à la demande en vigueur.

Il s’est également transformé au contact d’une culture occidentale. Les formes de Christian Tissier ne sont pas les formes originelles, et la pédagogie occidentale n’est pas la pédagogie japonaise.

Or, on considère aujourd’hui l’aikido français comme une référence mondiale.

Nous sommes en 2022.
L’aïkido est à des années lumière de l’âge d’or qu’il a connu.
La crise sanitaire a porté un coup fatal à la discipline.

C’est dans ce contexte critique qu’il faut s’interroger : 2022 n’est-il pas un nouveau moment charnière pour l’aikido ? La transformation de cet art martial n’apparaît-il pas comme une évidence ?

Aujourd’hui, les sports de combats centrés sur l’efficacité ont le vent en poupe (Boxe, Grampling, Kravmaga, MMAA…).
En parallèle, l’aikido ne parvient pas à se connecter aux besoins du grand public, en quête d’application concrète de la discipline.

Loin de moi l’idée de transformer l’aikido en Kravmaga, mais plutôt de le compléter au contact d’autres disciplines martiales pour le rendre plus complet.

Car c’est une vérité, l’aikidoka ne sait pas frapper, ni donner de coup de pied. Il ne permet donc pas de développer la puissance physique de ses pratiquants.

Je n’ai pas de vision précise de ce que pourrait être le renouvellement de l’aikido, mais je suis convaincue qu’il passera par des mutations au contact d’autres disciplines.

Si certains crient déjà au blasphème, j’aimerais poser cette simple question : qu’est-ce qui constitue l’essence de l’aikido dans la mesure où il a déjà muté depuis sa création ?

👉 Et si la dérive venait au contraire de l’immobilisme ?

Car après tout, le dit purisme n’est-il pas optu, obsolète voire sectaire ?

La réflexion est ouverte.

 

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