Il y a quelques temps, Corps et Esprit Martial avait rédigé un article sur la préparation physique sur mon blog. Voici aujourd’hui, un nouvel article rédigé personnellement sur le sujet sous un angle différent : au delà des conseils pour entretenir son corps, je m’interesse également au travail mental du pratiquant pour lever ses appréhensions physiques mais également s’économiser dans la durée.

1/ L’échauffement en aikido : étape essentielle ou artificielle ?

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Aujourd’hui, j’ai envie de m’exprimer sur un sujet qui me taraude depuis quelques temps : l’échauffement en aikido.
Pour rompre un tabou, je dirais que j’ai longtemps pensé qu’il m’était inutile.
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Mais c’est parce qu’elle est jeune me diriez-vous !
Sûrement. Mais ce n’est pas la seule raison.
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J’admets volontiers que les exercices de respiration et d’étirement me sortent de ma zone de confort (je suis souple comme une branche) et me fatiguent avant la pratique.
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Mais au delà de mon propre confort, je trouve que l’échauffement en aïkido manque cruellement d’exercices de gainage, de cardio, et de renforcement musculaire.
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Il y a quelques semaines, j’ai suivi l’échauffement d’Olivier Pierre, 4e dan d’aikido et 5e dan de karaté, qui enseigne aujourd’hui à Pantin. Son échauffement était dynamique et atypique pour l’aikido : gainage, pompes, abdos..
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Cet échauffement m’a permis de faire deux constats :
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🔹 Un certain nombre d’aikidoka manque d’entretien physique
🔹 Un échauffement dynamique permet de mieux préparer son corps aux chutes (j’ai immédiatement vu la différence, sur un tatami dur)
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Bien sûr, Olivier Pierre n’est sûrement pas le seul à proposer ce type d’échauffement.
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Bien sûr, je ne peux pas mettre tous les enseignants dans le même lot et il y aura sûrement des voix pour s’insurger contre mes propos.
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Mais, c’est tout de même une tendance que j’ai observé en 5 ans de pratique.
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➰ Or, l’aikidoka a besoin d’entretenir un bon gainage pour travailler sur son centrage.
➰ L’aikidoka a besoin de renforcer sa musculature, pour adopter de bonnes postures
➰ L’aikidoka a besoin de travailler sur une bonne cadence, pour maintenir son endurance.
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Rimes à part, l’aikidoka aurait intérêt à puiser des ressources empruntées de d’autres disciplines (martiales ou non) pour entretenir sa forme, sa silhouette, et sa puissance.
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Mais il n’est pas toujours facile de sortir des sentiers battus du mimétisme, surtout quand, pour certains, l’aikido n’est pas considéré comme une discipline sportive.
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Sport ou non, l’aikido convoque des principes de martialité tels que la condition physique, l’unité du corps et l’équilibre, comme le mentionne la CSDGE.

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2/ Comment se préserver physiquement dans la durée ?

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Il y a quelques semaines, j’ai assisté au cours dispensé par Michael Thai, 5e dan Aikikai, et fils de Maurice Thai, 6e dan aikikai. Michael vit au Japon depuis maintenant 18 ans et pratique un aikido d’influence nippone. La légereté et la souplesse sont merveilleusement incarnées dans sa pratique.
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Ce cours m’a permis de prendre du recul sur notre pratique française : si l’aikido n’est pas un art martial compétitif, les pratiquants finissent souvent “cassés” avec l’âge.
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Et pour cause, nous ne pratiquons pas un aikido écologique en France, mais un aikido “sexy”. Or, cet aikido de “démo” axé sur une vision particulière de la martialité (associée à une forme de virilité/dualité) propose des chutes spectaculaires, un contact brutal avec le sol, et une mise à mal des articulations.
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Alors comment s’économiser dans notre pratique de l’aikido ?
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✅ On peut se rapprocher du sol pour des chutes “écologiques”
✅ On peut limiter les chutes enlevées (n’oublions pas qu’elles restent des chutes uniquement conçues pour le tatami)
✅ On peut travailler sa souplesse pour éviter les contractions de nos muscles
✅ On peut limiter la pratique à genoux pour protéger nos articulations- On peut écouter son corps et ne pas se faire violence quand on est froid ou fatigué
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Maintenant, comment sortir de sa zone de confort en s’économisant ?
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✅ On peut alterner pratique intensive et douce dans un même cours
✅ On peut adapter l’échauffement à l’intensité de la pratique et affuter son corps en parallèle (entretien physique hors du dojo)
✅ On peut développer sa martialité en adoptant le bon état d’esprit (distance, disponibilité, posture, intentions)
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Une fois ces préconisations rappelées, peut-on rendre la pratique à la fois écologique (intégrité physique) et vendeuse (sexy pour un public de néophytes) ?
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Ce sera sûrement l’objet d’une prochaine réflexion 😉

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3/ Appréhensions physiques : identifier les causes pour se dépasser sur le tatamis

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En tant que pratiquante, j’ai devant moi une marge de progression dans mon rôle de uke. Plus précisément, je dois encore travailler sur certaines appréhensions physiques liées au déséquilibre et aux chutes. Pourtant, ce n’est pas toujours l’ukemi en tant que tel que j’appréhende. Lorsque je travaille en confiance avec mon partenaire, la peur se dissipe.
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C’est pourquoi, il existe de nombreux paramètres à prendre en compte lorsqu’on veut comprendre les peurs d’un pratiquant.
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Voici donc 6 paramètres à considérer pour identifier ses peurs, et reprendre confiance en soi sur les tatamis !

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Le caractère spectaculaire de la chute (sur le plan visuel)

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Première cause identifiable de l’appréhension physique : la détresse psychologique. Lorsqu’on est spectateur d’une chute spectaculaire telle que celles réalisées sur Kubi nage, ou encore les chutes enlevées sur Shiho nage ou Irimi Nage, on peut facilement se retrouver dans un état de stress. Et c’est normal, car il n’est pas facile de faire la dissociation entre le rendu visuel de la chute, et la douleur (ou non) qu’elle a engendrée.

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La peur de la douleur

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La peur de la douleur est également un élément à considérer pour travailler sur ses appréhensions physiques. Pour reprendre les exemples de chutes cités plus haut, on peut avoir peur de se faire arracher la tête sur Kubi nage, ou se faire déboiter l’épaule sur shiho nage. Bien sûr, ces peurs ne sont pas sans fondement, mais si les chutes sont réalisées dans un cadre sécurisé, il n’en sera rien.

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La peur de ne pas contrôler

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Uke et Tori ont tous les deux une responsabilité dans la gestion des chutes : si tori doit garantir un cadre sécurisant pour uke, ce dernier devra travailler sur son lâcher prise à travers une détente musculaire. Les crispations générées par le besoin de contrôle sont propices à des accidents physiques.

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L’intention du tori

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La chute n’est pas toujours l’élément le plus “terrifiant” en aikido. A titre d’exemple, je peux chuter sans problème avec tel partenaire mais développer de l’appréhension physique avec un autre. Pourquoi ? Parce que je doute sur sa bienveillance, ou sa capacité à garantir un cadre sécurisé pour la réalisation de la chute. De même, on peut développer des appréhensions physiques dans la pratique des armes avec un partenaire dangereux (qui attaque sans attendre que la garde soit ouverte, ou qui vise des organes vitaux …)

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Le gabarit de tori

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La différence de gabarit peut impressionner. En tant que petit gabarit, il m’arrive d’avoir des appréhensions physique liées au fait de pratiquer avec un partenaire pesant le double de mon poids, ou me dépassant de deux têtes. Les grands gabarits n’ont pas toujours plus de force ou de puissance, mais ils demeurent impressionnant pour un partenaire craintif.
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La puissance de tori

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La puissance, qui peut être indépendante du gabarit, est également un facteur d’appréhension physique. Lorsqu’un partenaire est puissant, et qu’on en est conscient, on peut par anticipation (consciente ou inconsciente), se raidir et finir par se blesser. Bien entendu, la puissance n’est pas un problème ! Seulement, elle demande à être dosée face à un partenaire plus novice, ou plus craintif.

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Voici donc 6 paramètres à prendre en compte lorsqu’on travaille sur ses appréhensions physiques. Comprendre et analyser ses peurs, c’est un premier pas vers le dépassement de ces dernières.

 

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Conclusion

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La préparation physique et mentale est une étape essentielle en aikido : elle permet de préserver son corps mais également de lever les appréhensions physiques et mentales. L’aikido est un art martial que l’on peut pratiquer sans condition d’âge ou de capacités physique, mais les blessures, et les traumatismes sont toujours à craindre à qui ne pratique pas dans la confiance et la bienveillance.

 

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Yéza Lucas, auteur du blog Aikido-millennials et coach professionnelle, 

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