Il y a quelques temps, j’ai eu l’occasion d’échanger sur l’Aikido avec une personne qui ne le pratique pas. Cet échange a été une véritable opportunité pour prendre du recul sur ma pratique, mais surtout sur ma réflexion autour de l’Aïkido. Que comprend le grand public de l’Aïkido ? Le message véhiculé par l’Aïkido est-il parlant ? Et surtout, comment est-il interprété ? Je vous propose donc un retour sur cet échange en répondant à 10 questions pour comprendre l’Aïkido. 

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1/ Pourquoi dit-on que l’Aïkido est un art martial non violent ?

L’Aïkido est selon moi non violent pour 4 raisons : 

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  • Il peut être offensif sans être agressif : la pratique implique en effet une codification des attaques et des déplacements qui le tient à l’écart d’une agressivité impulsive et non maîtrisée. En cela, il est non violent. 

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  • Il ne porte pas atteinte à l’intégrité physique ou mentale de l’autre : les coups ne sont pas portés mais simulés (atémis), les frappes et saisies sont réglementées et les organes vitaux ne peuvent être touchés. Sur le plan moral, l’humiliation ne fait pas partie de l’étiquette et cette même étiquette (appelée Reishiki) demande à ce que les partenaires pratiquent dans le respect des règles du dojo (faire le salut, pratiquer avec tout le monde et respecter l’ensemble des protocoles traditionnels sur le tatami)

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  • L’autre est un partenaire et non un adversaire : ce dernier agit en connivence avec nous dans le but de nous faire progresser dans la pratique. Par conséquent, il n’y a pas de vainqueur ni de vaincu.

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  • Les immobilisations n’ont pas pour objectif de blesser le partenaire, mais simplement de le neutraliser pour l’empêcher d’attaquer. Lorsqu’un pratiquant tape avec sa main sur le tatami (signe de douleur), son partenaire doit arrêter sa clé de bras afin de préserver son intégrité physique.

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2/ Pourquoi dit-on qu’il n’y a pas de compétition ?

Création avec Dall-E

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Il n’y a pas de compétition car l’objectif n’est pas de gagner face à un adversaire.

L’Aïkido est le résultat d’une connexion entre deux partenaires. Il s’agit donc d’un échange et non d’une confrontation ni d’un combat. 

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Par conséquent, l’objectif n’est pas de compter des points mais plutôt de réaliser un travail d’observation et de communication avec son partenaire pour pouvoir travailler harmonieusement ensemble. 

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Le fondateur de la discipline Morihei Ueshiba disait d’ailleurs que la meilleure victoire est la victoire contre soi-même, qui permet de se dépasser. 

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3/ Sans compétition, qu’est-ce qui rend la discipline stimulante ?

Il n’y a pas de compétition en Aïkido, c’est un fait. Pour autant, la discipline reste stimulante, car elle propose : 

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Des passages de grades, qui permettent de monter en niveau. Comme au Judo, la ceinture noire est le premier pas vers une voie martiale confirmée. L’Aïkido compte des gradés allant du 1er au 8e Dan.

 

Une progression technique (infinie). Au-delà des grades, on peut également se focaliser sur sa propre progression technique : mieux travailler ses chutes (pour préserver son corps des frappes et des clés articulaires), ses immobilisations (clés de bras), ses placements (pour éviter les attaques). L’ensemble de ces éléments contribue à renforcer l’efficacité de la pratique, même si l’Aïkido n’a pas vocation à se transformer en combat de rue. 

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Un répertoire technique extrêmement varié et des modes de travail diversifiés : en Aïkido, on peut travailler debout, l’un debout et l’autre à genoux, et tous les deux à genoux. On peut travailler à main nue ou/et avec des armes variées (Sabre, couteau, bâton). On peut également travailler sur des frappes, des saisies, des doubles saisies, des saisies avant et arrière, des étranglements, des coups de pied (peu utilisés)…en résumé, de nombreuses techniques réalisées à partir de nombreuses attaques permettent de varier les combinaisons ! 

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4/ Quel est le but de l’Aïkido s’il n’y a pas de vainqueur ?

On entend souvent dire que le but de la pratique, c’est la pratique en Aïkido. 

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Certains cherchent à tendre vers un geste dit parfait.

D’autres recherchent l’efficacité de leur technique.

Les plus ambitieux veulent passer des grades.

Les plus téméraires veulent réaliser des chutes spectaculaires.

Les plus intuitifs cherchent à acquérir une grande disponibilité corporelle. 

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Il n’y a pas qu’un seul but en Aïkido, mais des objectifs qui sont propres à chacun.

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Et il y a de quoi faire ! D’autant plus que les objectifs peuvent évoluer avec les années.

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5/ Est-ce que l’Aïkido favorise la souplesse ?

Les échauffements régulièrement pratiqués peuvent y contribuer mais ce n’est pas l’objectif de l’Aïkido. L’Aïkido en revanche cherche à développer une disponibilité corporelle, à savoir, la capacité à accepter un déséquilibre physique. 

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Cette sensation nous met naturellement dans un état d’inconfort, mais permet de travailler le lâcher-prise …ce qui est l’objectif d’un grand nombre d’individus dans leur quotidien, hors des tatamis !

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6/ L’Aïkido est-il un sport ?

L’Aïkido est d’abord un art martial. Toutefois, pratiqué de manière dynamique, il peut être considéré comme une pratique sportive.

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Si l’on sent tient à la définition d’un sport selon le Larousse, il s’agit de :

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  • 1. Activité physique visant à améliorer sa condition physique.
  • 2. Ensemble des exercices physiques se présentant sous forme de jeux individuels ou collectifs, donnant généralement lieu à compétition, pratiqués en observant certaines règles précises.

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En lisant ces définitions, l’Aikido est donc un sport !

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L’Aïkido peut d’ailleurs faire l’objet de prescription médicale dans le cadre de l‘Activité physique adaptée (depuis 2016), partie intégrante du dispositif Sport santé. 

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L’Aïkido est d’ailleurs une pratique que l’on peut commencer à tout âge car il est un allié dans la préservation du corps. Il suffit donc simplement d’adapter l’intensité de la pratique à sa condition physique. 

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Rajoutons à cela que l’Aikido, pratiqué à la FFAAA s’intègre dans le PSF (Projet Sportif Fédéral) : ” La campagne PSF est l’occasion pour les clubscomités interdépartementaux et les ligues de la FFAAA de bénéficier d’un soutien financier pour la mise en place de projets autour de l’Aïkido et de ses disciplines associées”

 

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Pour résumer, l‘Aïkido, lorsqu’il est pratiqué avec intensité, fait transpirer car c’est une pratique qui bouge ! Le bas du corps est vivement mobilisé (hanches, cuisses) car un travail de centrage est essentiel pour réussir ses techniques avec un maximum de partenaires. L’Aïkido pratiqué aujourd’hui dans la plus grande fédération française, la FFAAA, invite à adopter des postures basses sur les appuis et sollicite ainsi les cuisses. 

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Il est également intéressant de rappeler que c’est cette dimension sportive qui attire les plus jeunes sur les tatamis. Comme le rappelle Micheline Tissier, dans une interview pour Aikido Aviron Bayonnais, en 2022, lorsque les jeunes transpirent, ils reviennent.

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Activité sportive et pratique martiale ne sont donc pas antinomiques. 

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7/ Les démos, c’est du pipo ? 

Lorsqu’on regarde une démonstration d’Aïkido, deux impressions contradictoires peuvent émerger : 

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  • 1/ Celui qui fait la technique est incroyable, car il fait chuter ses partenaire en les touchant du bout des doigts

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  • 2/ L’Aïkido est une supercherie car les partenaires chutent tout seul

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Rappelons déjà à quoi servent les chutes. 

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  • Elles servent à fuir un danger, et constituent donc un déplacement. 
  • Elles servent également à se libérer d’une contrainte articulaire en replaçant son corps pour éviter la douleur. 

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Maintenant, est-on obligé de faire des chutes enlevées ? 

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Les chutes enlevées sont ces chutes spectaculaires qui permettent au corps de faire le tour d’un axe (celui pris par le partenaire, souvent le poignet). Ces chutes sont réalisées dans un excès de vitesse. Elles sont spectaculaires et visuellement impressionnantes lors des démonstrations, où l’on amplifie les mouvements pour donner une dimension artistique à la prestation. 

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Toutefois, elles ne sont ni écologiques pour le corps (vibration dans toute la colonne vertébrale, risque de plat de dos), ni réalisables sur un sol dur. 

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De manière générale, l’Aïkido fonctionne lorsque la pratique est en mouvement : c’est le déséquilibre créé par le temps d’avance pris par l’un des deux partenaires qui permet de réussir ses techniques ou d’envoyer son partenaire à la chute. 

 

Oui, certains chutent tout seul, mais ce n’est pas le sens initial donné à la chute. 

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8/ L’Aïkido est-il une danse ?

L’Aïkido propose des mouvements circulaires mais n’en demeure pas moins un art martial. 

Par conséquent, même s’il prend en considération une certaine esthétique dans le mouvement (précisions des gestes et des placements), l’objectif n’est pas chorégraphique, mais martial.

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On se replace pour rester vigilant. On fait des mouvements circulaires pour mettre l’autre en mouvement. 

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De plus, là où le danseur peut laisser ses pieds se décoller, l’Aikidoka doit s’asseoir sur des postures stables. 

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Et pour finir, rappelons que malgré les apparences et les accoutrements, l’Aïkido ne se pratique pas en musique. Si le rythme existe, il doit prendre en considération la situation martiale et non la dimension artistique. 

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9/ Qu’est-ce que vaut une ceinture noire d’Aïkido ?

Une ceinture noire d’Aikido vaut une ceinture noire d’Aïkido. Elle n’a pas vocation à se confronter à une ceinture noire de JJB ou de Judo.  D’ailleurs lorsque vous êtes ceinture noire d’un art martial, vous ne l’êtes pas dans un autre. Un 1er dan Judoka redevient ceinture blanche dans un cours d’Aikido où il débute. 

 

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Elle confère un certain niveau technique dans la discipline, qui évoluera en fonction des prochains grades à passer. 

 

La ceinture noire est le premier grade à passer devant un jury régional. En France, il s’agit d’un grade UFA (Union des Fédérations d’Aïkido), reconnu par les deux grandes fédérations d’Aïkido : la FFAAA et la FFAB.

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10/ Que vais-je apprendre après un premier cours ?

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Après un premier cours, vous aurez réalisé quelques déplacements de base : les tai sabaki, les tenkans…et quelques chutes (avant ou arrière). 

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Les chutes et les déplacements sont le solfège de l’Aïkido.

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C’est à partir de cela que vous allez pouvoir le pratiquer dans les règles de l’art. 

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Vous apprendrez également une ou deux techniques basiques, dont une immobilisation. 

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Vous ne retiendrez pas ce que vous avez vu. 

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Vos neurones seront sûrement en ébullition. 

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Mais si l’ambiance sur le tatami vous a plu, et que vous revenez, vous finirez d’abord par transpirer, progresser techniquement et prendre confiance en vous durablement. 

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Conclusion 

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L’Aïkido n’est pas qu’un art martial. Il vous transforme dans votre quotidien, dans votre rapport aux autres mais également à vous-même.

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Après 7 ans de pratique, je me sens plus confiante au quotidien, plus disciplinée sur un tatami, et plus incisive dans ma pratique. Le chemin est encore long, mais la route est toujours plaisante.

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Alors, qu’attendez-vous pour tester l’Aïkido ?  

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