L’efficacité, un terme omniprésent dans les discussions autour des arts martiaux, de la self-défense et des sports de combat, mérite d’être interrogé. Que signifie réellement être « efficace » dans ces disciplines ?
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La question se pose notamment dans une discipline comme l’Aikido, qui se distingue par l’absence de compétition : comment définir et mesurer cette efficacité ? Si certains arts martiaux et sports de combat se basent sur la performance en compétition pour évaluer la maîtrise, l’Aikido met en avant une approche philosophique, centrée sur la neutralisation des conflits plutôt que sur la victoire.

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De plus, lorsqu’on parle de savoir se défendre dans la rue, les choses se compliquent. L’efficacité réelle dépend non seulement des techniques apprises au dojo, mais aussi de facteurs personnels tels que notre gabarit, notre capacité à gérer le stress, et notre réaction face au danger. Dans une situation de crise, la connaissance technique ne suffit pas toujours ; c’est notre capacité à rester calme, à nous adapter et à réagir de manière appropriée qui fait toute la différence. Dans cet article, j’invite à une réflexion sur la notion d’efficacité, qui vous permettra peut être de choisir l’art martial qui vous correspond en toute connaissance de cause.

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L’efficacité dans les arts martiaux, sports de combat et self-défense : kesako ?

Passage de grade de 2ème dan d’Aikido

 

Arts martiaux et sports de combat : l’efficacité Versus performance

Dans un contexte sportif, l’efficacité est souvent associée à la victoire. Plus vite et de manière plus décisive on gagne, plus on est perçu comme efficace. Mais cette définition est-elle valable dans le cadre des arts martiaux comme l’Aikido ?
Dans les sports de combat, l’efficacité peut être mesurée par des critères comme le nombre de coups portés, la puissance, ou la vitesse d’exécution. Mais dans l’Aikido, un art qui se concentre sur la neutralisation et la non-violence, l’efficacité pourrait se définir autrement : par la capacité à contrôler une situation sans causer de dommages inutiles, à rediriger l’agression sans user de force brute.

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Efficacité dans la self-défense : la réalité du terrain

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Quand on parle de self-défense, l’efficacité est souvent perçue à travers le prisme de la survie. Il s’agit de sortir indemne d’une situation dangereuse, ce qui peut inclure l’esquive, la négociation, ou même la fuite.

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Mais là encore, il est intéressant de remettre en question la notion de ce qu’est une “réponse efficace”. Est-ce qu’une technique est considérée comme efficace seulement si elle met l’agresseur hors d’état de nuire, ou est-elle tout aussi valable si elle permet d’éviter la confrontation ?

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L’efficacité, un terme peu questionné dans la recherche d’une pratique martiale

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On parle souvent d’efficacité dans les arts martiaux, sans forcément interroger le terme :
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👉 Est-ce que l’efficacité c’est savoir se défendre dans la rue ?
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👉 Est-ce que l’efficacité, c’est la rapidité d’exécution d’une technique ?
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👉 Est-ce que l’efficacité, c’est blessé ou anéantir l’autre ?
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👉 Est-ce que l’efficacité, c’est la rapidité d’apprentissage et d’assimilation pendant les cours  ?

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Plus généralement, est-ce pertinent d’ériger l’efficacité en valeur absolue au lieu de l’évaluer en situation ?
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Prenons quelques exemples :
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➡️ Un art martial qui serait optimal dans la rue «en théorie » mais dont le pratiquant a un temps de réaction lent, n’est pas « efficace ».
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➡️ Un art martial dit « de dojo » pourrait se révéler plus optimal dans une situation d’adversité, si le pratiquant sait gérer son stress et penser de manière stratégique sous pression.
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🌟 L’efficacité dépend du pratiquant.
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🌟 L’efficacité est en effet conditionnée à la fréquence de ses entraînements, à son passif martial, à son histoire, et à ses habilités physiques et mentales.
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🌟 L’efficacité dépend de la situation.

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Si certains arts martiaux sont davantage portés sur la self-défense, réduire l’efficacité à une technique serait vain. La situation permet-t-elle de réaliser la technique dite « efficace » ?

Les arts martiaux peuvent répondre à des attentes en matière d’efficacité, à condition de se mettre d’accord sur ce qu’elle constitue réellement.
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En 2024, savoir se défendre dans la rue est toujours le rêve d’un grand nombre d’individus.
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Mais capitaliser sur le choix d’un art martial ou d’un sport de combat n’est pas suffisant.
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Et c’est ce que le marketing et la publicité ne nous disent pas.
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Parler d’efficacité absolue sans questionner le terme, ni remettre du contexte est en effet une publicité mensongère pour certaines disciplines sportives et/ou martiales.
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À titre personnel, je dirais que l’efficacité, c’est ce qu’il reste quand on sort du cadre habituel de pratique.
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Arts martiaux : vous ne pratiquez pas un art martial pour vous défendre dans la rue

image générée par Dall-E 3

 

Les arts martiaux, c’est comme du développement personnel, mais à une échelle corporelle et collective. 

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Vous ne vous lancez pas dans la pratique d’un art martial pour apprendre à vous défendre dans la rue. Ça ne peut pas être juste ça. 

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Ça, c’est la vocation d’un sport de combat ou de self-défense pure et dure. Un art martial, c’est la recherche d’une voie. Même si au début, vous ne le savez pas. 

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Mais ce que vous savez, c’est que vous avez envie d’apprendre à faire des choses avec votre corps. Vous avez peut-être également envie de travailler sur votre mental. 

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La suite est une question d’affinité personnelle. 

 

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Chaque budo vous ouvre un chemin. 

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Ce que vous ne savez peut-être pas aujourd’hui, c’est que ce chemin peut être le chemin d’une vie. 

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 Tout comme votre développement personnel, la voie des arts martiaux est infinie.

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Pour qu’on soit bien clair, quand je dis qu’on ne pratique pas un art martial uniquement pour se défendre dans la rue, ça ne veut pas dire que la dimension self-défense n’est pas considérée.
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Évidemment que lorsqu’on s’inscrit dans un Dojo, on est quelque part dans une recherche d’efficacité de la pratique. 
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Mais entre la recherche d’une efficacité technique et la capacité de l’assimiler en situation, il y a un monde.
C’est pour ça que je dis que dans la pratique d’un art martial, on recherche autre chose.
Même au début.
 Lorsqu’on choisit un art martial, il y a une curiosité autour de la culture et de la philosophie de cet art martial. 
 Sinon, on ferait tous du Krav maga 😜
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L’Aikido : une approche de l’efficacité différente

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L’Aikido se distingue par son approche philosophique. L’objectif n’est pas tant de vaincre un adversaire mais d’adapter sa pratique aux réactions de son partenaire. Alors, comment mesurer l’efficacité dans ce contexte ? Est-ce que réussir à désamorcer une situation avec un minimum de confrontation est plus ou moins efficace qu’une réponse physique ?

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Les techniques d’Aikido, bien que souvent critiquées pour leur manque de réalisme en situation de combat “de rue”, sont souvent plus efficaces sur le long terme, car elles cherchent à minimiser les dégâts pour toutes les parties impliquées. Elles enseignent aussi la maitrise de soi, une compétence qui, dans bien des cas, est la clé pour éviter un conflit inutile.

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En discutant avec de la notion d’efficacité dans les arts martiaux avec Charles, professeur de Kung-fu, nous tirons le constat commun que si le Kung-fu et l’Aïkido ne sont pas directement portés sur le combat de rue, un pratiquant expérimenté saura réduire ses mouvements pour les rendre efficaces.

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L’Aikido : le plus opérationnel des arts martiaux ?

En parcourant le web, on trouvera des centaines d’articles sur l’efficacité de l’aikido. Le sujet fait effectivement débat. D’un point de vue extérieur, on y voit des chutes spectaculaires, des déplacements aériens, ainsi qu’une tenue folklorique. D’un point de vue d’un néo-pratiquant, on retient, des noms de techniques complexes, des déplacements codifiés et des postures contre-intuitives.
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Rajoutez à cela, la dimension spirituelle et énergétique, et vous en aurez perdu plus d’un. Et pourtant, lorsqu’on s’accroche, on prend conscience de toute l’efficacité opérationnelle de cette discipline martiale.
Car derrière les paillettes et les fioritures réside une philosophie et une technique adaptable et applicable hors des tatamis.
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Voici donc 3 éléments rendant l’aikido opérationnel au quotidien :
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Une discipline qui permet de neutraliser sans être réprimandé

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L’aikido que nous pratiquons aujourd’hui porte l’étiquette “non violent” car il permet de se sortir d’une situation physiquement conflictuelle par des mouvements neutralisant, sans frappe. C’est pour cette raison que les techniques d’immobilisation des forces de l’ordre sont inspirées de cet art martial.Les immobilisations et les torsions articulaires réalisées en réaction à une attaque permettent ainsi de contrôler un danger sans pour autant porter atteinte à l’intégrité physique de cette même menace.
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Une discipline qui rend plus confiant au quotidien

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Pratiquer l’aikido régulièrement nous permet de vivre des frappes et des saisies, mais également de travailler des entrées adaptées pour s’en défaire. Ce travail nous invite à développer nos capacités d’anticipation, de réactivité et d’adaptation. Acquérir ces nouvelles aptitudes ne fera pas de nous un ninja hors du dojo mais nous permettra tout de même d’adopter de bons réflexes en cas d’agression. Cela nous permet d’être plus confiant et de dégager plus d’assurance dans notre démarche.
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Une discipline qui apprend à adapter ses techniques à “la vraie vie”

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L’aikido est une discipline favorisant des mouvements amples et des spirales (je caricature un peu). Dans un espace restreint, et face à un attaquant ne pratiquant pas la discipline, il est inutile d’essayer de reproduire ces mouvements. Pour que les mouvements soient efficaces “dans le métro”, il est nécessaire de les écourter et de les adapter. On pourra ainsi appliquer (avec un certain niveau certes) des formes plus directes de techniques présentées au dojo, sans tenkans et sans chutes enlevées.
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L’aikido peut etre un discipline martiale efficace dans une situation réelle. Mais à condition d’avoir développé un certain niveau de pratique permettant de prendre du recul sur les apprentissages du dojo. Par ailleurs, l’aikido est adapté à nos sociétés réprimandant la violence, car il préserve dans sa pratique, l’intégrité physique de l’autre, et dans son éthique, opère de manière défensive, et non offensive. Et pourtant, l’aikido ne parle pas assez au grand public, demandeur d’efficacité dans la martialité. A nous de mieux communiquer sur les vertus de notre belle discipline pour en assurer sa pérennité.
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Conclusion : l’efficacité est multifacette

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En fin de compte, l’efficacité dans les arts martiaux, la self-défense et les sports de combat ne se résume pas à la simple capacité de vaincre. Elle dépend du contexte, des objectifs de la pratique et des valeurs que chaque discipline véhicule.
Peut-être que la véritable efficacité réside dans notre capacité à choisir la bonne réponse au bon moment, qu’elle soit physique ou non, et à protéger non seulement notre intégrité physique mais aussi mentale et émotionnelle.

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Au-delà des combats ou des situations de self-défense, l’efficacité dans les arts martiaux peut aussi se traduire par l’impact qu’ils ont sur la vie quotidienne. L’efficacité de la pratique ne se mesure pas seulement sur un tapis de dojo ou dans une situation de confrontation, mais aussi dans la manière dont elle façonne la résilience, la discipline, et la capacité à gérer les conflits dans d’autres domaines de la vie.

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Pour conclure, j’élargirai avec cette petite phrase de Bruno Rivière, 6ème dan d’Aikido qui résumait l’efficacité de la manière suivante : “l’efficacité, c’est être en bonne santé”. Un pré-requis indispensable avant de nous lancer dans un débat sur la technique ou la mise en situation.

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